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Quinzaine du commerce équitable 2006 : Examinons nos rapports marchands !
28 avril 2006

Les techniques marketing ont indéniablement réussi à assurer la notoriété de l’expression « commerce équitable » dans l’opinion. Mais elles ont transformé en quelques années une problématique politique en produit publicitaire, dont l’efficacité en terme d’améliorations concrètes des conditions de vie des producteurs du sud est discutable.

D’une action de sensibilisation, la quinzaine du commerce équitable est devenue au fil des années une quinzaine pour la promotion du prétendu label Max Havelaar. L’objectif de la Plate Forme du Commerce Equitable (PFCE) est aujourd’hui de faire adhérer l’opinion à une marque, d’en assurer la notoriété. En aucun cas d’inviter nos concitoyens à réfléchir sur leurs actes de consommation. Cette confusion entre action de sensibilisation et démarche commerciale contribue à développer aux yeux de l’opinion une vision manichéenne du monde, ou la promotion du bon produit « équitable »™ prend bien soin de ne pas remettre en cause l’idéologie consumériste [1], alors que ce sont précisément nos modes de développement qui sont en cause aujourd’hui. Cette situation est d’autant plus inquiétante que désormais cette propagande commerciale s’étend en milieu scolaire avec l’aide financière des collectivités locales. Les enfants, premières victimes d’un consumérisme effréné, sont une nouvelle fois la cible de marchands, d’autant plus dangereux qu’ils se parent de vertus. Il est donc urgent de les amener à réfléchir sur leurs actes de consommation.

Pour le gouvernement actuel, très sensible au poids de la grande distribution, le « commerce équitable » n’est qu’une cause humanitaire qui doit se restreindre à faciliter les conditions d’accès aux marchés à des producteurs « défavorisés » du sud. Selon l’accord de l’AFNOR, dont il faut rappeler qu’il fut imposé par le gouvernement sous la pression du ministère de la coopération soutenu par certains acteurs du commerce équitable en mal de reconnaissance institutionnelle et de subventions, en aucune manière, les groupes de producteurs ne peuvent examiner les conditions de commercialisation de leurs produits. Les industriels et les distributeurs qui transforment et/ou commercialisent ces produits « équitables » n’étant soumis à aucune obligation peuvent donc se permettre toutes formes d’abus.

La question d’un commerce équitable, ne repose pas sur l’intensification coûte que coûte des échanges marchands. Seul l’examen de ces échanges, est de nature à répondre aux enjeux d’ une mondialisation qui permette aux peuples de vivre et travailler au pays en ayant la possibilité de (re)conquérir de nouvelles libertés et de nouveaux droits. Tel est l’enjeu d’une approche universelle du commerce équitable.

 
Examinons nos rapports marchands, quinzaine 2006  - 143 ko
Examinons nos rapports marchands, quinzaine 2006
QMD

 

[1] Campagne Max Havelaar 2006 : « Pour un monde plus juste, faites vos courses »


 

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Forum

  • > Quinzaine du commerce équitable 2006 : Examinons nos rapports marchands !

    22 mai 2006, par Alexyelle

    Il est vrai que le commerce équitable, par le biais du label Max Havelaar, est l’une des nombreuses victimes de la sur-promotion. Malheureusement, il est difficile de promouvoir un produit sans en parler.

    Même si le commerce équitable appartient désormais à l’industrie marketing comme n’importe quel produit, il a était crée dans le but de donner aux petits producteurs des droits qu’ils n’avaient pas. Tout n’est peut être pas parfait, mais tout n’est pas corrompu non plus. Rien est tout noir ou tout blanc.

    Certes il faut faire attention à ce que le label Max Havelaar ne bascule pas complètement dans la sur-médiatisation, mais il est encore loin le temps où celui-ci envahira tous les rayons des supermarchés, superettes, épiceries ou autres commerces, et où il deviendra le dictateur sans foi ni loi que vous décrivez dans votre article.

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    • > Quinzaine du commerce équitable 2006 : Examinons nos rapports marchands !

      23 mai 2006, par Emmanuel

      Bonjour,

      Merci de votre contribution au débat. Nous divergeons sur plusieurs points. « Il est difficile de promouvoir un produit sans en parler », pour moi le commerce équitable n’est pas un produit. Votre contribution montre toute l’efficacité des techniques marketing. Au lieu de construire un raisonnement par soit même, on adhère à un totem. Cela évite de se poser des questions, de se remettre en question, d’examiner l’impact que nos activités économiques génèrent, aux quotidiens, sur l’humanité dans son ensemble et sur l’environnement. A partir du moment où nos modes de vie ne sont pas accessibles à toute l’humanité et ne sont pas supportables pour l’écosystème, c’est la nature même de nos modes de vie qui sont en cause si nous voulons promouvoir des échanges plus équitables. Il est donc plus important de se poser la question du coût d’un prix d’un produit, savoir quel usage ont va faire de ce bien, quel impact son usage et sa fin de vie va avoir sur l’environnement, que d’adhérer à une « marque ». Ce n’est pas l’hégémonie de Max Havellaar qui est cause, c’est la politique de cette organisation qui est contestable. Elle fait de la misère du monde un avantage concurrentiel, avant tout soucieux de faire la promotion de sa valeur de signe, de vendre son « symbole ». Le débat à propos de Max Havellaar n’est pas moral mais politique.

      Le commerce équitable n’a pas été crée dans le but de « donner aux petits producteurs des droits qu’ils n’avaient pas ». On ne donne pas des droits, on les conquière. Max Havellaar, n’est pas une victime de la « sur promotion », il est l’un des agents principaux du libéralisme. Il incarne la politique social du libéralisme afin que la question d’une régulation des échanges marchands soit porté par les seules épaules des consommateurs, sous le contrôle attentif des agences de communication et des mass-médias.

      Heureusement que le commerce équitable ne se réduit pas Max Havellaar. Je vous invite à lire le dernier ouvrage de C. Jacquiau "Les Coulisses du commerce équitable", aux Editions Mille et une Nuits.

      Sincères salutations Emmanuel Antoine

  • > Quinzaine du commerce équitable 2006 : Examinons nos rapports marchands !

    Bonjour

    Vous avez tout à fait raison, il faut faire la différence entre le commerce équitable "Altermondialiste" et le commerce équitable qui ne garantit que le respect des minimums sociaux au sud (type Max H.).

    Pour ma part, il faudrait militer pour que la notion de commerce équitable soit réservée à la démarche "Altermondialiste" et que la démarche FLO (type Max H. et AFNOR) soit appellée autrement : garantie des minimums des droits des producteurs...

    Donc je pense que la loi devrait faire cette différence.

    Nicolas

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  • > Quinzaine du commerce équitable 2006 : Examinons nos rapports marchands !
    Contrairement à ce que vous affirmez la PCPE n’a pas pour objectif de faire adhérer l’opinion à une marque, d’en assurer la notoriété et a bien pour but d’inviter nos concitoyens à réfléchir sur leurs actes de consommation mais ce n’est pas tout . En effet la plate forme comprend 31 membres dont la légitimité en tant qu’acteurs du commerce équitable et de l’économie solidaire n’a rien à envier à celle des membres de la plate forme MINGA. Pour preuve leurs engagement dans les actions de plaidoyer au niveau international et leurs actions d’éducation qui s’attaquent aux formes acctuelles de domination économiques et politiques. Pour rappel la liste complète de ses membres : ALTER ECO 75012 Paris Althéane 75014 Paris ARTISAL 16400 La Couronne Artisanat-SEL (Service d’Entraide et de Liaison) 45701 Villemandeur cedex Artisans du Soleil 49310 Montilliers ASPAL (Association de Solidarité avec les Peuples d’Amérique Latine) 16400 La Couronne Azimuts - Artisans du Népal 47400 Tonneins Boutic Ethic 49220 Le Lyon d’Angers CCFD - Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement 75001 Paris Commercequitable.com 94210 La Varenne St Hilaire Croq’Nature 65200 Bagneres de Bigorre Equiterre 75020 Paris Ethnik.org 13012 Marseille ETHOS 75019 Paris Fédération Artisans du Monde 75010 Paris Guayapi Tropical 75012 Paris Idéo 75019 Paris Ingénieurs Sans Frontières 75019 Paris La Route des Sens 34150 Aniane Lilah Distribution 64520 Bidache Max Havelaar France 93566 Montreuil Cedex Sira Kura 75020 Paris Solidar’Monde 94400 Vitry-Sur-Seine TDS (Tourisme et Développement Solidaires) 30250 Aubais Ti Ar Bed 29200 Brest Yamana 59000 Lille
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    • > Quinzaine du commerce équitable 2006 : Examinons nos rapports marchands !

      1er mai 2006

      Madame,

      Ce n’est pas la sincérité de l’engagement des membres de la PFCE qui est en cause dans cette contribution, mais la politique de cette organisation. Pour la PFCE, l’objectif de quinzaine est de « répondre au besoin d’information des citoyens afin de facilité leur « passage à l’acte d’achat » ».

      Dans la page de présentation de la quinzaine sur le site de la PFCE, il n’est nullement question d’inviter nos concitoyens à réfléchir à leurs actes de consommation. La PFCE défend une conception du commerce équitable en tant que secteur d’activité et sur ce point nous avons une conception différente du commerce équitable. Pour nous, il ne s’agit pas d’assurer le taux de notoriété du commerce équitable, c’est l’évolution du rapport marchand qui est en cause et non l’édification d’une niche commerce « équitable » !

      Enfin sachez également que Azimuth n’est plus membre de la PFCE, pour notamment des raisons qui sont abordées dans cette contribution.

      Salutations

      Emmanuel Antoine

  • > Quinzaine du commerce équitable 2006 : Examinons nos rapports marchands !

    29 avril 2006, par Caro Pierre

    bonjour

    je suis ... malheureusement heureux, de lire cet article.

    Lorsque vous étiez passés au Préau à Saint Gildas des Bois,il me semble que je vous avais fait part de mes craintes quant à voir le commerce équitable ... n’être qu’un autre commerce.

    Je me permets de vous rappeler le symbole du Comptoir où, l’un face à l’autre, nous échangeons en réciprocité. C’est cette forme de commerce que je veux bien développer car nous en avons trop souvent oublié le sens. Ce sont les relations au Préau : Comptoir d’ExpressionS.

    amitiés à tous

    Pierre

    PS Je viens de créer l’Association A6 Association Ah doc, Altruiste, Adéquate, Artistique, Adoptable pour gérer les activités et assurer la gestion des interventions du Préau, du Café des âges, de l’Ecole de la Paix ; également proposer études et mise en place de projet de retraite.

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    • > Quinzaine du commerce équitable 2006 : Examinons nos rapports marchands !

      3 mai 2006, par Géraldine Guilpain

      bonjour,

      votre réaction face à la situation du commerce équitable aujourd’hui me paraît très bien venue. Etudiante en sciences politiques, j’effectue une mémoire sur les problématiques du commerce équitable.

      La prépondérance d’association comme Max Havelaar, fait souvent oublié la dimension politique du commerce équitable. Il est clair que la communication qui se fait autour du commerce équitable conforte les consommateurs dans leur mode de vie et la surconsommation y est souvent présentée comme un moyen de se déculpabiliser face à la situation des petits producteurs des pays en voie de développement.

      Peut-être est-ce un premier pas pour faire changer les relations commerciales mondiales. rien ne semble moins sûr. Les grands groupes industriels adhèrent au commerce équitable, s’en servent dans leurs stratégies marketing, sans changer en rien leur pratiques de production et de distribution.

      Enfin, voilà, merci de laisser place au débat sur ce site

      • > Quinzaine du commerce équitable 2006 : Examinons nos rapports marchands !

        11 mai 2006

        bonjour,

        j’aimerai juste apporter trois petites pierres au débat.

        1) L’idée même de Max Havelaar, et d’autres labels commercialisés en grandes surfaces, est de faire passer le commerce équitable dans la grande distribution : c’est effectivement en augmentant les volumes vendus que plus de producteurs du CE trouveront des revenus supplémentaires de la vente de leur produits, et pourront vivre dignement dans ce secteur.

        2) Je ne suis pas sûr que les produits estampillés max havelaar ou PFCE soit moins propices à remettre en cause mes comportements que les produits d’autres produits du CE, dont les votres (en quoi acheter par correspondance ou dans une boutique associative me rapproche plus du petit producteur qui vit à 5000 km de là ?). En abandonnant les marques premiers prix pour des produits CE, je fais tout de même attention à mon budget et consomme moins... et délaisse même les produits exotiques pour les produits locaux.

        3) Ces deux premiers points me font dire que les organisations de CE ne cherchent pas à "intensifier coûte que coûte les échanges marchands" mais permettent simplement aux consommateurs de substituer à leurs achats classiques des produits respectueux des conditions de rémunération des petits producteurs ou des salariés de plantation.

        enfin je crois que nous sommes tous conscients que, quand le commerce équitable aura accompli son objectif... il n’y aura plus d’organisations de commerce équitable. Et les salariés de Max havelaar, d’alter eco ou de bio equitable en sont sûrement aussi conscients que d’autres don quichotte (soit dit en passant, j’espère que vous et moi sommes bien conscients de la faible portée du CE par rapport aux enjeux liés aux agricultures vivrières étouffées par les exportations subventionnées des producteurs européens.)

        associativement

        • > Quinzaine du commerce équitable 2006 : Examinons nos rapports marchands !

          29 mai 2006, par Pierrick

          permettez moi de réagir : Si nous remettons en questions nos modes de consommation il faut commencer par le début : Les grandes surfaces ont instauré un système redoutable basé sur la loi du plus fort et nos agriculteurs en sont les premières victimes. De plus les conditions de travail y sont déplorables, sans parler de l’univers abrutissant dans lequel les consommateurs sont recus. Mon premier objectif en tant que consommateur a été de rayer complètement les grandes surfaces de mon budget, c’est un travail de longue haleine mais humainement je m’y retrouve largement. Comment pouvons nous prétendre faire du commerce équitable en commercant avec des acteurs aussi dénués de scrupule et d’éthique ?

          Si donc nous décidons de ne pas acheter ces produits en grande surface, a qui les acheter ? La encore les propositions que vous faites me paraissent soulever des questions : par correspondance (il est ou l’humain ?),dans une boutique associative (pourquoi pas si les vendeurs sont rémunérés ). A mon avis le meilleur endroit c’est bien dans une boutique, pas forcément associative. En quoi cela vous rapproche du producteur ? Eh bien au moins vous connaissez l’origine du produit, vous pouvez demander plus d’informations au commercant et vous entrez dans un rapport marchand autrement plus riche qu’en grande surface ou sur internet.

          Enfin « quand le commerce équitable aura atteint son objectif... » La je suis utopiste mais quand même vous poussez un peu le bouchon ! Je ne crois pas une seule seconde que tous les humains vont se mettre à tout acheter équitable dans des supermarchés équitables. Devenir un consommateur responsable propose une autre approche plus humaine, plus éthique qui changera votre vie et influencera sans doute votre entourage mais de la à atteindre l’homme nouveau en achetant son café...je suis dubitatif !

          Merci pour ce temps de parole.

          Pierrick Le Grain de Sable Marseille

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