Imposer les OGM au monde Les USA et l'Argentine utilisent la menace de l'OMC pour annuler l'interdiction des OGM en Bolivie, au Sri Lanka et en Croatie. Des "fuites" d'informations laissent entendre que les petits pays doivent affronter des pressions énormes lorsqu'ils essayent d'appliquer une réglementation stricte aux OGM. L'Union européenne fait d'ailleurs l'objet d'une pression équivalente. Par "Friends of the Earth International" (17 décembre Bruxelles / La Paz / Washington) |
Friends of Earth International (FoEI) accuse les USA et d'autres pays favorables aux OGM tels que l'Argentine de persécuter les petits pays qui essayent d'adopter des lois interdisant les organismes génétiquement modifiés (OGM). FoEI a pu présenter des documents provenant officieusement des USA et d'Argentine menaçant ces petits pays d'une action de l'OMC s'ils prévoyaient d'adopter des règles limitant l'utilisation des OGM. Des pays comme le Sri Lanka et la Croatie ont subi de ce fait une pression énorme. La Bolivie, qui avait adopté une résolution interdisant les OGM en janvier 2001, a été forcée d'annuler cette loi du fait de la pression de l'Argentine et de ses sociétés d'agrobiotechnologie. La décision bolivienne d'interdire l'importation des produits sous-produits et denrées alimentaires dérivant de cultures génétiquement modifiées était prévue pour un an, de janvier à décembre 2001. Le gouvernement bolivien s'était engagé à étendre cette interdiction après décembre 2001 et à lui donner force de loi. Cette promesse avait été faite au terme d'un accord écrit signé par le gouvernement bolivien et la FOBOMADE, association de travailleurs et de petits exploitants agricoles. Une organisation écologiste bolivienne vient d'apprendre que ce même gouvernement a pris en octobre une décision révoquant cette interdiction, sans en informer le public et sans aucune annonce officielle. Cette annulation montre bien la faiblesse de notre gouvernement devant les pressions de l'Argentine et des sociétés "agrobiotech", a déclaré Maria Luisa Ramos, de la FOBOMADE. Il est révoltant qu'un petit pays comme le nôtre soit obligé d'accepter des OGM malgré l'opposition publique. FoEI a pu obtenir officieusement une copie d'une note envoyée par la mission bolivienne à Genève au ministère des Affaires étrangères bolivien, qui prétend que les producteurs de soja argentins sont à l' origine de ce revirement législatif, du fait qu'ils exportent 5 milliards de dollars de soja génétiquement modifié en Europe et aux USA. Dans cette note, l'ambassadeur de Bolivie à Genève donne en effet l'impression de céder à la pression argentine en soulignant auprès de son ministère que la décision bolivienne semble pouvoir être rejetée par l'OMC. Il y déclare que "la situation actuelle est très délicate étant donné que la mission bolivienne considère que du point de vue des règles de l'OMC, les raisons fournies par la mission argentine sont tout à fait valables et notre pays ne peut justifier le maintien des décisions prises". Par ailleurs, ainsi que le révèlent d'autres documents de FoEI, les Argentins ont menacé la Bolivie des sanctions de l'OMC pendant des mois. Les pressions sur les pays qui décident d'adopter une législation stricte contre les OGM sont devenues la règle. Au début de l'année, le Sri Lanka préparait un projet de loi sur les produits alimentaires interdisant les OGM. Le conseiller agricole de l'ambassade des USA en Inde a alors menacé le Sri Lanka d'une sanction de l'OMC de 190 milions de dollars s'il ne suspendait pas cette interdiction. Cette loi devait entrer en vigueur en septembre 2001, mais suite à la pression des USA et de l'Australie, elle n'a jamais vu le jour. En Croatie, à l'occasion d'une table ronde organisée le 10 décembre par le ministère croate de l'Environnement, FoEI et l'ONG européenne ANPED ont dénoncé les persécutions américaines contre le gouvernement croate en vue de lui faire abandonner ses projets de moratoire contre les OGM. Dans une note que Green-Action-FoE Croatie put obtenir officieusement, l'ambassade américaine disait que "si une telle interdiction entrait en vigueur, les USA feraient valoir leurs droits auprès de l'OMC". Le ministre croate l'Environnement, Bozo Kovacevic, a déclaré le 12 décembre qu'il ne répondrait pas à la lettre de l'ambassade américaine. La note affirmait par ailleurs que "il a été démontré que les produits alimentaires traités biotechniquement sont aussi sains que les produits alimentaires traditionnels originaires des USA ou d'ailleurs". Mais des groupes américains ont affirmé, dans une lettre adressée au ministère croate de l'Environnement en réponse à cette note, que le cadre réglementaire et les politiques de contrôle actuelles sont incapables de démontrer que les OGM sont sans risques. "La promotion des OGM par le gouvernement américain est si
agressive L'ambassade américaine "suggère la prudence dans l'application des directives européennes sur les biotechnologies car leur mise en oeuvre requiert des infrastructures et une administration importantes". Actuellement, les USA cherchent à miner le projet de législation européen sur l'étiquetage et la certification d'origine et font pression sur l'Union européenne pour qu'elle lève son moratoire. L'Union européenne a notifié à l'OMC ses nouvelles règles d'étiquetage
et de certification d'origine en matière d'OGM. Les spéculations sur une éventuelle "attaque" de l'Union
européenne par les USA à l'OMC vont bon train. "L'OMC est
l'instrument que les USA et les grands groupes de biotechnologies
utilisent pour obliger tous les pays du monde à accepter les OGM",
déclare Juan Lope, conseiller en ingéniérie biotechnologique à FoEI.
"Nous en appelons à tous les gouvernements du monde afin qu'ils résistent
à l'OMC. Chaque pays devrait avoir le droit d'établir un moratoire sur
l'introduction des OGM jusqu'à ce qu'un cadre réglementaire et un système
de contrôle de l'application de ces réglements soient mis en place
afin d'assurer une bonne sécurité (alimentaire)". |